La médecine nucléaire connaît actuellement un essor important, tant sur le volet diagnostic que thérapeutique. Tour d’horizon de cette discipline médicale avec le Dr Olivier Schaeffer, nouveau chef de service du service de médecine nucléaire du CHL.
Qu’est-ce que la médecine nucléaire ?
La médecine nucléaire est la branche de la médecine qui utilise les propriétés des isotopes radioactifs à des fins médicales diagnostiques (imagerie) et thérapeutiques.
La médecine nucléaire diagnostique (partie imagerie de la spécialité) s’est fortement développée et joue aujourd’hui un rôle central dans la médecine nucléaire. Elle représente plus de 90 % de l’activité du service de médecine nucléaire du CHL. Les deux modalités d’imagerie en médecine nucléaire les plus couramment réalisés sont la tomo-scintigraphie TEMP et le PET-CT (ou TEP-TDM en français). La médecine nucléaire thérapeutique représente quant à elle moins de 10 % de l’activité du service de médecine nucléaire du CHL, et concerne majoritairement les pathologies thyroïdiennes (cancéreuses ou non) ainsi que les cancers métastatiques.
La médecine nucléaire couvre le diagnostic et le suivi de nombreuses pathologies :
- cancéreuses (historiquement et essentiellement),
- endocriniennes,
- cardiopathies (coronariennes essentiellement ou infectieuses),
- maladies inflammatoires, systémiques,
- pathologies ostéoarticulaires (orthopédiques, rhumatismales, traumatiques ou infectieuses),
- de nombreuses explorations fonctionnelles d’organes cibles (en pneumologie, néphrologie, neurologie…).
Le service de médecine nucléaire du CHL dispose des équipements médicaux polyvalents, à savoir :
- Deux gamma-caméra, qui permettent de faire des tomoscintigraphies TEMP.
- Le seul appareil PET-SCAN (TEP-TDM) du pays, partagé entre les différents services de médecine nucléaire de Luxembourg au sein du Centre National PET avec la majorité des radiotraceurs autorisés en Europe. Un générateur Gallium-68 est notamment en utilisation depuis deux ans, grâce à l’installation d’une radiopharmacie et de la collaboration étroite avec les radiopharmaciens, permettant d’utiliser des radiotraceurs pour l’exploration des cancers de la prostate et neuro-endocrine.
- Deux chambres de thérapie au sein de l’unité 23 pour les traitements par iodothérapie (des pathologies thyroïdiennes notamment).
En tant que nouveau chef de service du service de médecine nucléaire du CHL, quels sont les objectifs que vous souhaitez atteindre dans le cadre de votre nouvelle fonction ?
Trois objectifs sont évoqués par Dr Schaeffer :
- « Le premier objectif, plus pragmatique, est de perfectionner notre activité de routine clinique (en TEMP et TEP) : que ce soit au niveau des procédures d’acquisition, des équipements ou des comptes-rendus médicaux, afin de répondre de façon optimale aux questions des médecins demandeurs pour apporter le meilleur service médical rendu possible au patient et son intégration à la prise en charge globale du patient. »
- « Le deuxième objectif est de renforcer la position de la médecine nucléaire au sein de la prise en charge multidisciplinaire des patients, surtout en cancérologie, et de continuer à développer notre participation et notre rôle au sein des Tumorboard. »
- « Le troisième objectif est de mettre en place la thérapie au 177-luthétium, dans certaines indications de cancer prostatique ou neuro-endocrines métastatiques qui est complémentaire de l’activité d’imagerie diagnostique déjà réalisée à l’aide du générateur de Galium-68 (c’est-à-dire les PETscan au 68Ga-PSMA et 68Ga-DOTA-TOC). C’est ce que l’on appelle la théranostique (contraction de thérapie et diagnostic) ; une « nouvelle » approche personnalisée en médecine nucléaire visant à sélectionner des patients à l’aide d’un radiotraceur en imagerie fonctionnelle (en PETscan au 68Ga-PSMA ou 68Ga-DOTA-TOC) qui pourraient bénéficier d’un traitement par radiothérapie interne vectorisée (par 177Lutétium utilisant la même cible fonctionnelle qu’en imagerie : à savoir les analogues PSMA ou DOTA-TOC).
Est-il question d’étoffer l’équipe prochainement ?
Un nouveau médecin, à temps plein salarié, viendra compléter l’équipe médicale du service de médecine nucléaire du CHL d’ici la fin de l’année 2023/début 2024.
Les objectifs poursuivis sont les suivants :
- Répondre à une demande croissante d’activité standard en médecine nucléaire,
- Mettre en place la théranostique (177Lu en prostate et tumeur neuro-endocrine),
- Mener davantage de projets pour développer l’activité du service,
- Promouvoir la visibilité des examens d’imagerie médicale (PET-Scan, scintigraphie…) par des actions de communication, et mettre l’accent sur la qualité et la sécurité de ces examens,
- Commencer à participer à des projets de recherche et universitaires.
Dr Olivier Schaeffer précise : « La croissance de l’activité en PETscan a largement dépassé nos prédictions ces dernières années, et ceci augmente pour deux raisons principales à mon sens. D’une part, le nombre d’indications d’examens d’imagerie en médecine nucléaire a augmenté : à chaque fois que l’on obtient un nouveau radio-traceur (en PETscan par exemple), de nouvelles indications se rajoutent à notre activité. D’autre part, la technique PETscan a prouvé son utilité dans le diagnostic et le suivi d’un nombre croissant de pathologies. En cancérologie notamment, le PETscan est indiqué dans un nombre croissant de types de tumeurs. Grâce à l’amélioration spectaculaire des traitements anti-cancéreux, les patients bénéficient de d’avantages d’options et de meilleurs traitements, dont il est nécessaire d’évaluer l’efficacité et, par conséquent, de recourir à l’imagerie médicale pour leur suivi médical. C’est pourquoi nous avons un recrutement de patients de plus en plus important et au plus long cours. »
Quel est votre message pour rassurer les patients sur les risques potentiels inhérents à la médecine nucléaire ?
Dr Olivier Schaeffer : « Aujourd’hui encore, la plus grande crainte des patients liée à une méconnaissance concerne la radioactivité et l’ensemble des rayonnements ionisants. La lutte contre la radiophobie passe par l’information. Notre rôle consiste donc aussi à donner une information claire aux patients et également aux autres professionnels de santé (essentiellement les médecins demandeurs) sur les effets secondaires liés aux examens irradiants. Il convient particulièrement de rassurer les patients sur les risques de l’imagerie médicale. Le rapport bénéfice-risque lié aux irradiations est évalué par des professionnels de santé au moment où l’examen a été demandé ou prescrit. Une fois que l’examen est fixé, c’est que l’examen est médicalement justifié, et que le risque apparaît très faible, voire négligeable en termes d’effets secondaires. Nous nous tenons également à disposition des médecins demandeurs pour les aiguiller dans le choix du meilleur examen, en fonction du contexte clinique de leur patient. »