Les questions taboues sur la ménopause

Les questions taboues sur la ménopause

À l'occasion de la Journée Mondiale de la Ménopause, célébrée le 18 octobre dernier, le Dr Juliette Fievez, gynécologue à la Clinique de la Ménopause du CHL, a brisé le silence autour de nombreux aspects encore tabous de la ménopause. Cet échange, riche en informations et en partages, a suivi la représentation de la pièce de théâtre Game Ovaires, qui a captivé le public rassemblé dans l’amphithéâtre du CHL.

Photo du Dr Juliette Fievez

Le Dr Fievez a souligné l'évolution du discours autour de la ménopause : «La ménopause reste un sujet tabou, mais on observe une libération progressive de la parole. Avec une population concernée qui ne cesse de croître et une représentation toujours plus importante de femmes en âge de ménopause dans le monde du travail. Je pense que dans les années à venir, nous verrons cette prise de parole s'amplifier davantage.»

La ménopause est-elle une maladie ?

L'OMS décrit la ménopause comme une étape naturelle de la vie d'une femme, marquant la fin de ses années de fertilité. Elle définit une femme comme ménopausée après une année complète sans menstruations. Dr Fievez a précisé : « L’OMS ne considère pas la ménopause comme une maladie, mais pour certaines femmes, elle peut être perçue ainsi, en raison des symptômes gênants causés par l’arrêt de l’activité ovarienne. Heureusement, la ménopause suit un processus évolutif, qui peut devenir plus positif avec le temps, même si la durée de cette transition varie d’une femme à l’autre. »

Que se passe-t-il au moment de la ménopause ?

La ménopause est une étape naturelle de la vie d’une femme marquée par des changements hormonaux significatifs. Le cerveau, par l'intermédiaire d'une petite glande appelée l'hypophyse, envoie des signaux aux ovaires grâce à deux hormones : la LH (hormone lutéinisante) et la FSH (hormone folliculo-stimulante). En réponse, les ovaires produisent des œstrogènes tout au long du cycle, et après l’ovulation, de la progestérone pour la seconde moitié du cycle. Les niveaux de ces hormones renvoient ensuite un retour au cerveau, modulant la stimulation des ovaires.

À l’approche de la ménopause, les ovaires deviennent de moins en moins sensibles à ces signaux et finissent par ne plus répondre. Cela entraîne une augmentation des niveaux de LH et de FSH dans le sang, mais malgré cette intensification du message cérébral, la production hormonale diminue. Le premier signe notable est la chute de progestérone, car les ovulations deviennent rares ou irrégulières. Cette réduction de progestérone par rapport aux œstrogènes provoque l’apparition de divers symptômes.

À quel âge est-on ménopausée ?

L’âge moyen de la ménopause est de 51 ans. Elle est précédée d’une période appelée péri-ménopause, qui commence en moyenne vers 47 ans et dure environ quatre ans. Pendant cette période, les cycles deviennent irréguliers : ils peuvent être plus longs, plus courts, voire absents, et les règles peuvent être plus abondantes ou plus légères.

Les symptômes les plus fréquents de la ménopause incluent entre autres : bouffées de chaleur, sueurs nocturnes, syndrome uro-génital, sautes d’humeur, dépression, prise de poids, douleurs articulaires, troubles du sommeil, sècheresse vaginale.

La durée et l'intensité de ces symptômes varient d'une femme à l'autre. En général, plus les symptômes se manifestent tôt, plus ils ont tendance à persister sur le long terme.

Les traitements de la ménopause sont-ils dangereux ?

La prise en charge des symptômes de la ménopause repose sur l’utilisation de traitements hormonaux et non hormonaux, souvent combinés pour un accompagnement plus complet et personnalisé :

  • Les traitements non hormonaux incluent des approches comme la phytothérapie, la kinésithérapie, la sophrologie, l’hypnose, l’acupuncture, le sport et la diététique.
  • Les traitements hormonaux, basés principalement sur l’administration de progestérone et d’œstrogènes, offrent plusieurs avantages. Ils contribuent à améliorer la qualité de vie et le bien-être des patientes en agissant sur l’ensemble des symptômes de la ménopause, tout en apportant une protection cardiovasculaire avec une réduction du risque d’infarctus et d’accident vasculaire cérébral (AVC). De plus, ces traitements jouent un rôle dans la prévention de l'ostéoporose et exercent un effet protecteur sur le système neuronal, notamment contre la maladie d'Alzheimer. Dr Fievez : « Pour limiter les risques cardiovasculaires associés, il est recommandé de commencer le traitement hormonal dans les 5 à 10 ans suivant le début de la ménopause, après un bilan cardiovasculaire préalable, avec un suivi régulier. Les recommandations actuelles préconisent une posologie minimale et une durée la plus courte possible, avec une réévaluation annuelle entre la patiente et le médecin, afin d’adapter le traitement en fonction des bénéfices, risques et attentes de chaque femme. »

Rappelons que les traitements hormonaux comportent certains risques et nécessitent des précautions spécifiques : 

  • Thrombose : ce risque est inexistant avec la voie transdermique (œstradiol transdermique).
  • Cancer de l'utérus : il est recommandé d’associer un progestatif aux œstrogènes pendant au moins 10 jours par mois, pour réduire ce risque. 
  • Cancer du sein : le traitement hormonal peut légèrement augmenter le risque de cancer du sein chez les femmes de 50 à 60 ans (+2 cas pour 1.000 femmes).

Dr Fievez : « Bien que des traitements hormonaux puissent présenter un léger risque de cancer du sein, des facteurs comme l’alcool, le surpoids, et l’obésité augmentent davantage ce risque. Une hygiène de vie saine, avec une alimentation équilibrée et une activité physique régulière, reste la meilleure prévention, que l’on suive un traitement hormonal ou non. »

Enfin, la ménopause est un moment important pour une prise en charge globale de la santé. C’est en effet l’occasion de réaliser des dépistages essentiels, tels que ceux du cancer colorectal, du col de l'utérus et du sein, ainsi que des bilans pour détecter le diabète, le syndrome métabolique, le risque cardiovasculaire et l'ostéoporose via des ostéodensitométries.

En conclusion, le Dr Fievez insiste sur l'importance de briser le tabou : si les symptômes affectent le confort et perturbent la vie quotidienne, il est essentiel de ne pas hésiter à consulter.