Dès le début de la pandémie, les équipes médico-soignantes du Laboratoire se sont pleinement investies pour que le CHL puisse disposer des dernières techniques et équipements de Biologie moléculaire requis pour la réalisation des PCR-Covid19.
Afin de disposer dans de meilleurs délais des résultats d’analyses et de détenir l’autonomie complète dans la réalisation des examens, le Laboratoire a revu son organisation et renforcé ses équipes. Ainsi, plusieurs techniciens sont venus rejoindre l'équipe de Biologie Moléculaire, en apportant, conjointement avec les biologistes, leur expertise et leurs compétences au service des patients et des cliniciens.
Aujourd'hui, cette analyse fondamentale est disponible à grande échelle sur des plages horaires élargies, sept jours par semaine, permettant aux équipes de terrain de prendre en charge et suivre les patients dans de meilleures conditions.
Cette organisation est aujourd'hui nécessaire pour un hôpital aigu comme le nôtre, hébergeant le Service National des Maladies infectieuses, mais aussi plusieurs services d'urgences et de soins intensifs et la salle d'opération, qui figurent parmi les plus gros demandeurs de cet examen.
La réalisation au CHL des examens répond aussi aux exigences sécuritaires liées à l'activité des plateaux techniques invasifs (frottis pré-interventionnels et préopératoires) et propose aux patients, mais aussi aux collaborateurs CHL, la possibilité de réaliser leurs prélèvements in situ et de disposer des résultats dans les meilleurs délais possibles (et même d'en être informés par SMS).
D'autre part, le Laboratoire réalise également cette analyse pour le compte d'autres institutions partenaires, comme le Rehazenter, le Centre de Colpach ou encore l'Hôpital de Steinfort
C'est donc avec une très grande fierté que nous arrivons aujourd'hui à une étape symbolique : la génération du 100.000ème résultat de PCR-Covid19 au CHL !
Quelles sont les complications possibles du Covid-19 ? Quels facteurs nous aident à prédire ces complications ? Vous trouverez quelques éléments de réponses ainsi que des liens vers les articles scientifiques pertinents à lire ci-dessous.
Complications
Bien qu’une grande majorité des patients Covid-19 présentent une forme légère à modérée de la maladie, de nombreux patients présentent des formes plus sévères avec des complications qui nécessitent une hospitalisation. Le temps médian entre l’apparition des symptômes et l’hospitalisation est de 11 jours (pour 50% des patients : de 8 et 14 jours) [1] pour une durée d’hospitalisation d’environ 11 jours (pour 50% des patients : de 7 à 14 jours) [1].
Les principales complications observées selon les données connues en Chine sont :
la prise en charge en unité des soins intensifs : Selon deux méta-analyses, elle concernerait 20,3% (intervalle de confiance à 95% - IC95% : 10,0–30,6%) [3] à 29,3%, (IC95% : 19,0-39,5%) [2] des patients Covid-19. Le temps médian entre l’apparition des symptômes et la prise en soins intensifs est de 12 jours (50% des patients entre 8 et 15 jours) [1]. Le temps passé dans cette unité est d’environ 8 jours (50% des patients entre 4 et 12 jours) [1].
le syndrome de détresse respiratoire aiguë : il concernerait 28,8% (IC95% : 14,7-42,9%) [2] à 32,8% (IC95% : 13,7–51,8%) [3] des patients. Le temps médian entre l’apparition des symptômes et ce syndrome est de 12 jours (50% des patients entre 8 et 15 jours) [1].
l’atteinte cardiaque sévère : elle concernerait 13% (IC95% : 4,1-13,0%) [3] des patients. Le temps médian depuis l’apparition des symptômes est de 15 jours (pour 50% des patients : de 10 à 17 jours) [1].
le syndrome de dysfonctionnements organiques multiples concernerait 8,5% (IC95% : 0,8-17,9%) [2] des patients.
le choc septique : il concernerait 6,2% (IC95% : 3,1–9,3%) [3] des patients. Le temps médian depuis l’apparition des symptômes est de 9 jours (50% des patients entre 7 et 13 jours) [1].
le décès : il concernerait 6,8% (IC95% : 4,4-9,3%) [2] à 13,9% (IC95% : 6,2–21,5%) [3] des patients Covid-19 en Chine. Le temps médian entre l’apparition des symptômes et le décès est de 18,5 jours (50% des patients entre 15 et 22 jours) [1].
Facteurs pronostiques
Dans nos articles précédents, nous avons mentionné les anomalies observées dans les analyses sanguines des patients Covid-19 ainsi que la présence de comorbidités chez un grand nombre de ces patients. Dans sa méta-analyse incluant 30 études et 53 000 patients Covid-19, Zhao et al. [4] a regroupé plusieurs de ces facteurs dans une même analyse statistique afin d’identifier lesquels d’entre eux étaient les meilleures prédicteurs de la sévérité de la maladie. Une forme sévère de la maladie existait chez 20,2% des patients (IC95% : 15,1-25,2%) et les décès concernaient 3,1% des patients (IC95% : 1,9-4,2%) intégrés à cette méta-analyse. L’âge (supérieur à 50 ans), le fait d’être un homme, de fumer et/ou de présenter une comorbidité (principalement une maladie chronique des reins ou des poumons ou une maladie cérébrovasculaire) étaient les principaux prédicteurs d’une forme sévère de la maladie. En ce qui concerne les analyses sanguines, un taux de lactate déshydrogénase (témoignant d’un dommage des tissus), de protéine C réactive (témoignant d’une inflammation) et de D-dimères (dosé dans les suspicions d’embolie pulmonaires) élevés ainsi qu’un taux de plaquettes et de lymphocytes bas était associés à une forme sévère du Covid-19. (voir « Analyses sanguines et imagerie médicale : anomalies fréquentes dans le Covid-19 » pour plus d’informations).
De nombreux autres facteurs ont été cités comme facteurs pronostiques du Covid-19. Des analyses statistiques complémentaires (en intégrant plusieurs facteurs dans la même analyse et non en les étudiant un après l’autre) sont nécessaires pour déterminer s’ils font partie des plus pertinents. Bien que certains facteurs comme l’âge et les comorbidités soient des facteurs que nous ne pouvons pas influencer, les facteurs étudiés dans les analyses sanguines peuvent, eux, être utilisés comme marqueurs de surveillance de la maladie, y compris dans la phase de guérison. Si les scientifiques y portent autant d’intérêt, c’est parce qu’ils peuvent aussi nous aider à trouver des traitements. Par exemple, Coomes et al. [5] ont pu démontrer que les taux d’interleukine 6 étaient 2,9 fois (IC95% : 1,2-7,2) plus élevés chez les patients ayant des complications comparés aux patients avec une forme légère du Covid-19. Un taux d’interleukine élevé est le signe d’une suractivation de la défense immunitaire pouvant être à l’origine des complications du Covid-19. Certains traitements, déjà disponibles pour traiter d’autres pathologies, ont la capacité de bloquer ces interleukines et sont donc considérés comme des traitements potentiels pour les patients Covid-19.
Quelles sont les anomalies que peuvent détecter les cliniciens lors d’une prise de sang d’un patient Covid-19 ou lors d’une imagerie médicale des poumons ? Vous trouverez quelques éléments de réponses ainsi que des liens vers les articles scientifiques pertinents à lire ci-dessous.
Analyses sanguines
Rodriguez-Morales et al. [1] ont rapporté les anomalies observées dans les analyses sanguines des patients Covid-19 dans une méta-analyse regroupant 19 publications scientifiques. Les principales sont:
Taux d’albumine diminué : Cela peut être le signe d’inflammations sévères diverses. Ce taux serait diminué dans 75,8% (intervalle de confiance à 95% : 30,5–100,0%) des patients Covid-19.
Taux de protéine C réactive (CRP) élevé : La protéine C réactive est une protéine qui apparaît dans le sang lors d’une inflammation aiguë. Elle concernerait 58,3% des patients (indice de confiance à 95% : 21,8–94,7%).
Taux de lactate déshydrogénase élevé : Une hausse dans le sang de cette enzyme présente naturellement dans de nombreux organes et tissues du corps humain (rein, cœur, muscles, foie, poumons…) témoigne d’un dommage des tissus. On l’observerait chez 57,0% (intervalle de confiance à 95% : 38,0–76,0) des patients Covid-19.
Lymphopénie : 43,1% (indice de confiance à 95% : 18,9–67,3%) des patients présentent un nombre de lymphocytes inférieur à 1500 par mm³ de sang. Les lymphocytes sont des globules blancs qui jouent un rôle important au sein du système immunitaire pour la fabrication des anticorps et pour attaquer les cellules infectées.
Taux de sédimentation érythrocytaire élevé : La vitesse de sédimentation est un test qui mesure la vitesse de chute des globules rouges dans un échantillon de sang laissé à la verticale. Une vitesse de sédimentation élevée est un signe d’infection. Elle serait observée chez 41,8% des patients Covid-19 (intervalle de confiance à 95% :0,0–92,8)
Ces anomalies sont peu spécifiques du Covid-19 et peuvent être observées dans de nombreuses infections. La thrombocytopénie (nombre de plaquettes sanguines < 150.000 /mm³ de sang) et la leucopénie (nombre de globules blancs totaux <4000 éléments/mm³) seraient aussi observées respectivement chez 36.2 et 33.7% des patients Covid-19 [2].
Toute anomalie doit toujours être interprétée en prenant en considération l’état général de santé du patient (maladies chroniques déjà connues, antécédents médicaux) et le stade de la maladie. Guan et al. [2] ont démontré que les patients avec une forme sévère du Covid-19 présentaient plus d’anomalies dans leurs résultats sanguins que les patients avec une forme légère de la maladie. Les chercheurs vérifient actuellement si certaines d’entre elles peuvent nous aider à déterminer l’évolution de la maladie (facteurs pronostiques).
Imagerie médicale
Guan et al. [2] ont rapporté 59,1% d’anomalies sur les radiographies des poumons des patients Covid-19 et 86.2% d’anomalies si un scanner était réalisé. Le scanner semble donc plus efficace pour étudier le Covid-19 que de simples radiographies des poumons. Fang et al. [3] dans sa revue systématique rapportent un pourcentage d’anomalie au scanner similaire (88.2% sur 2528 cas étudiés) ce qui confirme son potentiel dans la détection et le suivi du Covid-19.
Le SARS-Cov-2 atteint très rapidement l’ensemble des 2 poumons ce qui est un signe particulièrement énonciateur de la maladie (87.5% des patients, 435/497) [5]. D’autres signes sont : l’infiltrat en verre dépoli (petites tâches blanches plus ou moins étendues qui apparaissent dans les poumons, 88% des patients, 346/393), localisé dans plusieurs lobes pulmonaires (78.8% des patients, 108/137), en zone postérieure (80,4% des patients, 41/51) et en périphérie des poumons (76.0% des patients, 92/121) [5]. Comme pour les analyses sanguines, les anomalies sont toujours à interpréter en tenant compte de l’état général de santé du patient et du stade de la maladie. L’âge est aussi un facteur important puisqu’on observe plus d’anomalies sur les patients âgés.
Le scanner des poumons permettrait ainsi d’évaluer le Covid-19 à 5 stades différents [4] :
Stade ultra-précoce : peut concerner des patients sans symptôme, avec un test de laboratoire négatif, ans les deux premières 2 semaines qui suivent l’exposition au virus.
Stade précoce : 1 à 3 jours après l’apparition de symptômes
Stade de progression rapide : 3 à 7 jours après l’apparition de symptômes
Stade de consolidation : 7 à 14 jours après l’apparition de symptômes
Stade de dissipation : environ entre 2 et 3 semaines après l’apparition de symptômes
Pour rappel, le Luxembourg à décider de s’équiper rapidement de plusieurs scanners au cours de cette pandémie. Leur installation est en cours.
Modes de transmission, contagiosité et survie du virus sur des surfaces inertes
Alors que les mesures de prévention se multiplient en Europe afin de limiter la propagation du Covid-19, de nombreuses questions se posent. Que connaissons-nous réellement du mode de transmission du Covid-19 ? Peut-on être contagieux sans le savoir ? Le virus peut-il réellement survivre sur des surfaces inertes? Vous trouverez quelques éléments de réponses et de réflexion ainsi que des liens vers les articles scientifiques pertinents à lire ci-dessous.
Modes de transmission
La propagation de personne à personne est le principal mode de transmission du SRAS-Cov-2. Elle a lieu essentiellement par le biais de gouttelettes produites lorsqu’on tousse, éternue ou parle. Une personne peut être infectée si ces gouttelettes rentrent directement en contact avec ses muqueuses ou si elle touche une surface infectée, puis touche ses yeux, son nez ou sa bouche. Le virus pouvant aussi être retrouvé dans les selles et la conjonctive, ces modes de transmission ne sont pas exclus mais restent probablement rares. Pour le secteur médical, les infections par frottis ou aérosols (microgouttelettes de moins de 5 micromètres qui peuvent apparaître au cours de certaines procédures comme les procédures dentaires, la bronchoscopie et certaines techniques chirurgicales) ne sont pas non plus exclues mais nous n’avons actuellement aucune preuve qu’elles existent. Enfin, les scientifiques n’ont pas encore pu déterminer si une transmission mère-enfant est possible au cours la grossesse. A notre connaissance, aucun des nourrissons évalués à la naissance n’était jusqu’à présent positif au test de référence du Covid-19 (RT-PCR basée sur la recherche du génome du virus). Certains possédaient toutefois des anticorps qui auraient très bien pu passer la barrière du placenta si la mère était infectée au cours de sa grossesse.
Contagiosité
Une protéine (« spike protein ») située la surface du virus serait à l’origine de la transmission rapide du virus. Celle-ci permet au virus de se fixer sur une cellule pour y libérer son ARN et l’infecter. Elle serait plus facilement clivée par les cellules du corps humain que d’autres virus de la même famille.
Le nombre moyen d'individus qu'une personne avec le SRAS-Cov-2 peut infecter (taux de reproduction de base du virus, R0) atteindrait selon l’Organisation Mondiale de la Santé des valeurs situées entre 1,4 et 2,5. Des études rapportent cependant des estimations de 1,4 à 6,5. Si le R0 du SRAS-Cov-2 semble autant varier d’une publication à l’autre, c’est que son estimation est basée sur des modèles mathématiques plus ou moins complexes. Ces modèles considèrent le nombre de personnes infectées (que l’on ne connaît jamais de manière exacte), susceptibles d’être infectées ou exposées, sans symptôme, retirées (décès et guérisons) et parfois de nombreux autres paramètres. Il faut aussi prendre en considération dans cette interprétation du R0 que les mesures barrières agissent sur le taux de contact et la probabilité d'infection et donc le modifient constamment.
Une personne est potentiellement contagieuse dès que la charge virale (quantité du virus présente dans le corps) devient importante, ceci avant même l’apparition des symptômes. La transmission par des sujets porteurs du virus sans symptôme est aussi possible et été décrite à plusieurs reprises. Selon les informations actuelles, la charge virale de ces personnes serait similaire à celle des patients présentant des symptômes. L'excrétion du virus au niveau du pharynx serait très élevée au cours de la première semaine de symptômes (7X108 copies d'ARN par prélèvement de gorge). L’apparition des anticorps (séroconversion) serait détectable 6 à 12 jours après l’apparition des symptômes sans pour autant observer un déclin rapide de la charge virale. Cette dernière pourrait être détectée jusqu’à 20 jours (entre 17 et 24 jours pour 50% des patients) après l’apparition des symptômes avec un cas rapporté de 37 jours.
Survie du virus sur différentes surfaces
Actuellement, une seule étude rapporte ces informations sur le SRAS-Cov-2 dans des conditions de laboratoires contrôlées (température entre 21 et 23°C ; humidité de l’air 65% pour le test des aérosols et 40% pour le test des surfaces). Le temps estimé de demi-vie du virus (temps pour que la quantité de virus soit divisée par deux) dans les aérosols serait de 1,1 heure. Rappelons que les aérosols sont définis comme des particules très fines en suspension dans l’air et qu’ils ne peuvent être comparées aux gouttelettes créées par une personne qui éternue, tousse ou parle car ils sont beaucoup plus volatiles. La durée de demi-vie du virus sur des surfaces inertes serait de 0,8 heures pour le bois, 3,5 heures pour le carton, 5,6 heures pour l’acier et 6,8 heures pour le plastique. Le virus a pu être détecté dans les aérosols après trois heures, jusqu’à 4 heures sur le bois, jusqu’à 24 heures sur le carton et de deux à 3 jours sur le plastique et l’acier. Nous ne savons toutefois pas jusqu’à quand les taux de virus observés restent assez importants pour qu’il y ait un risque d’infection.